Le mandat ad hoc est une procédure préventive et confidentielle de règlement amiable des difficultés pour les entreprises. L’objectif est de déployer un certain nombre d’actions pour rétablir la situation de l’entreprise avant la cessation des paiements.
Qu’est-ce qu’une procédure de mandat ad hoc ?
Lorsqu’une entreprise connaît des difficultés (financières, mais aussi situations de blocage entre associés), ses dirigeants peuvent solliciter le Président du Tribunal de commerce en vue d’obtenir la désignation d’un mandataire ad hoc pour les aider à résoudre leurs difficultés. Ce dernier fixe la mission du mandataire ad hoc.
Cette procédure amiable est par essence confidentielle. En effet, sa réussite repose en particulier sur la garantie de sa confidentialité. Il s’agit de préserver l’image et le crédit de la société à l’égard de ses clients et de ses concurrents et lui permettre de faire face à ses difficultés dans un certaine forme de sérénité.
L’article 611-3 du code de commerce précise que cette obligation de confidentialité est opposable aux représentants du personnel : « Le débiteur n’est pas tenu d’informer le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel de la désignation d’un mandataire ad hoc ».
Quel accès à la procédure de mandat ad hoc pour l’expert-comptable du CE ?
Dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 9 octobre 2019 (n° 18-15.305, FS-P+B), l’expert-comptable du comité de groupe avait été désigné pour procéder à l’examen annuel des comptes.
Ayant été informé de la désignation d’un mandataire ad hoc, l’expert-comptable sollicitait des informations sur le déroulement et les suites réservées au mandat ad hoc, notamment les cessions d’actifs envisagées et les actions entreprises pour la recherche de possibles repreneurs.
S’appuyant sur les termes de l’article L. 611-3 du Code de commerce, l’expert-comptable soutenait que seule la désignation du mandataire ad hoc était couverte par la confidentialité et non le déroulement de sa mission. Il rappelait qu’il disposait des mêmes pouvoirs d’investigation que le commissaire aux comptes et avait donc droit à la communication de toutes les pièces qu’il estimait utiles à l’exercice de sa mission. A ce titre, il considérait être seul compétent pour apprécier les documents nécessaires à sa mission.
La Cour de cassation ne retient pas ces arguments et décide que l’obligation de confidentialité est justifiée par la discrétion nécessaire sur la situation de l’entreprise concernée et sur les éventuelles négociations entre dirigeants, actionnaires, créanciers et garants de celle-ci ; qu’elle s’impose dès lors à l’expert-comptable du comité de groupe.
L’obligation de confidentialité est justifiée par la discrétion nécessaire sur la situation de l’entreprise concernée, (…) elle s’impose à l’expert-comptable du comité de groupe
La chambre sociale précise que le caractère confidentiel ne se limite pas à la désignation du mandataire ad hoc, mais qu’elle s’étend aux actes relevant de sa mission.
Quid de l’expert du CSE ?
Bien entendu, la solution ne se limite pas au seul comité de groupe. Elle est opposable aux experts-comptables du Comité social et économique qui solliciteraient des documents relatifs à une procédure de mandat ad hoc. Cela ne signifie pas que le CSE perd son droit à l’information-consultation dans l’hypothèse où la société se trouve placée sous mandat ad hoc. Le CSE sera naturellement informé et consulté si un projet venait à se concrétiser le justifiant.
En revanche, la Cour de cassation confirme que l’expert-comptable des IRP ne dispose pas d’un droit absolu à définir les documents utiles à sa mission. Pour la Cour de cassation, un équilibre entre le secret des affaires (nécessaire à la réussite d’opérations commerciales et sociétaires) et le droit à l’information des IRP ne doit pas nécessairement s’envisager en faveur des IRP. Cette évolution est livrée dans une hypothèse de mandat ad hoc. Il n’y pas de raison qu’elle ne trouve pas à s’appliquer à toutes les entreprises.