Le projet d’ordonnance relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise prévoit la création d’un comité social et économique (CSE), qui a vocation à se substituer à 3 instances représentatives du personnel actuellement prévues par le Code du Travail : les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT. Cependant des interrogations sur la mise en œuvre du CSE subsistent.
Romain Thiesset, avocat associé, apporte des réponses à ces premières interrogations.
Il est à ce jour prévu que cette ordonnance n’entrera en vigueur qu’à la date de publication des décrets pris pour son application, et au plus tard le 1er janvier 2018.
Toutefois, le projet d’ordonnance prévoit par ailleurs que les entreprises pourvues d’instances représentatives du personnel, au jour de la publication de l’ordonnance, devront mettre en place le CSE à la date à laquelle les mandats actuels prennent fin et au plus tard le 31 décembre 2019.
De même, le projet d’ordonnance prévoit que l’entreprise peut unilatéralement (après avoir recueilli l’avis de chaque instance) proroger les mandats en cours pour une durée maximale d’un an, si les mandats en cours arrivent à échéance entre la date de publication de l’ordonnance et le 31 décembre 2018.
Il en résulte, a priori, une contradiction : il ne peut être prévu, d’une part, que les entreprises doivent mettre en place le CSE dès la date de publication de l’ordonnance si les mandats en cours arrivent à échéance alors que, d’autre part, il est prévu que l’ordonnance n’est applicable qu’à compter de la date de publication des décrets d’application. D’ailleurs, il ne peut être demandé aux entreprises de mettre en place le CSE dès la date de publication de l’ordonnance alors que, à cette date et en l’attente des décrets d’application, les entreprises ne connaissent pas les modalités concrètes de mise en place de cette instance (nombre de sièges selon l’effectif, notamment).
Ainsi, il conviendrait de considérer que les entreprises n’ont pas à organiser l’élection des membres du CSE tant que ces décrets d’application n’auront pas été publiés. Autrement dit, une entreprise pourrait et devrait renouveler ses instances telles que prévues actuellement par la loi si l’échéance des mandats en cours intervenait avant la date de publication des décrets attendus.
Une première difficulté subsiste : le temps de préparation des élections est long, et la date de publication des décrets est à ce jour inconnue (même si elle sera nécessairement antérieure au 1er janvier 2018) ; c’est donc dans la situation où l’échéance des mandats en cours est prévue au mois d’octobre, novembre ou décembre 2017 qu’il sera opportun, et même indispensable, de proroger les mandats, ce que le projet d’ordonnance permet dès la publication de celle-ci et de manière unilatérale.
Une seconde diffidifficulté reste en suspens : que peuvent ou doivent faire les entreprises qui ont déjà engagé leur processus électoral en vue de l’échéance, dans les prochaines semaines, des mandats en cours ? Si un protocole d’accord préélectoral a été conclu, se pose la question de savoir si les élections doivent se tenir conformément aux dispositions de ce protocole et si celui-ci constitue, en pratique et sauf révision, un obstacle à l’application de l’ordonnance ? Le protocole est-il applicable ou devient-il caduc du fait de l’entrée en vigueur de l’ordonnance ? La réponse à ces interrogations n’est pas évidente et peut même être appréciée différemment, en l’attente d’un éventuel éclaircissement, selon la situation de chaque entreprise… En revanche, tant que le protocole d’accord préélectoral n’a pas été conclu, on peut considérer que l’entreprise pourra et même devra proroger les mandats en cours, et donc interrompre le processus électoral s’il a été engagé.
Synthèse :
Si les mandats en cours arrivent à échéance avant la date envisagée de publication de l’ordonnance : le processus électoral, qui a dû être engagé, doit être poursuivi à son terme. Les mandats des instances renouvelées prendront fin au plus tard le 31 décembre 2019, nonobstant la durée des mandats prévue par le protocole d’accord préélectoral conclu à cette occasion qui porterait leur terme au-delà de cette date.
Si les mandats en cours arrivent à échéance après le 31 décembre 2017 : les prochaines élections permettront la mise en œuvre du comité social et économique, dans la mesure où les décrets auront, entretemps, été publiés. Il est néanmoins possible de prévoir la prorogation des mandats, de manière unilatérale, pour une durée maximale d’un an et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2019.
Si les mandats en cours arrivent à échéance entre la date envisagée de publication de l’ordonnance et le 31 décembre 2017 et qu’un protocole d’accord préélectoral a déjà été conclu, se pose la question de savoir si les élections doivent se tenir conformément aux dispositions de ce protocole ? Le protocole est-il applicable ou devient-il caduc du fait de l’entrée en vigueur de l’ordonnance ?
Si les mandats en cours arrivent à échéance entre la date envisagée de publication de l’ordonnance et le 31 décembre 2017 et qu’un protocole et qu’un protocole d’accord préélectoral n’a pas été conclu, il est alors nécessaire de proroger unilatéralement les mandats en cours, dès la publication de l’ordonnance et en l’attente des décrets d’application, pour mettre en place, à échéance des mandats prorogés, le comité social et économique.