Statut collectif

L’enjeu

Depuis 5 ans, le législateur a engagé une dynamique de restructuration des branches professionnelles. Les branches doivent atteindre une taille critique leur permettant de se structurer pour répondre aux évolutions de leur rôle, notamment au soutien du développement de la négociation collective.

L’objectif est donc de renforcer les branches professionnelles :

  • en opérant des rapprochements entre les branches (« fusions » de branches), ce qui mécaniquement réduira leur nombre ;
  • en favorisant l’atteinte d’un seuil de « viabilité » (fixé à ce stade à 5.000 salariés minimum couverts par chaque branche).

L’état des lieux

Le législateur avait fixé à la fin de l’été 2019 l’objectif d’un nombre de branches réduit à 200 (contre 700 en 2014). A date, les chiffres ne sont pas encore connus, mais il est acquis que l’ambition politique a été plus optimiste que la réalité du terrain… Pourtant, alors même que la 1ère phase peine à atteindre son objectif quantitatif, une 2ème phase de rapprochements de branches est annoncée.

Selon la ministre du Travail, à terme, il devrait subsister moins de 100 branches professionnelles en France (dans son programme présidentiel l’engagement du candidat Macron était de réduire leur nombre entre 50 et 100 branches). Cet effet d’annonce est sans aucun doute tactique : il s’agit de contraindre, par la pression du temps, les acteurs des branches à accélérer leurs démarches de rapprochement.

L’émergence de contentieux

Le ministère du Travail favorise les démarches consensuelles (rapprochements « amiables », c’est-à-dire décidés par les acteurs des branches eux-mêmes). Mais il n’hésite pas à manier les outils directifs que lui offre la loi (le ministère est habilité à prendre des arrêtés contraignant les branches à fusionner entre elles).

Le ministère du Travail favorise les démarches consensuelles. Mais il n’hésite pas à manier les outils directifs que lui offre la loi

Toutefois, que le rapprochement soit sur une base volontaire ou dirigée, il a nécessairement des impacts sur la place des organisations syndicales, qu’il s’agisse de la partie salariale ou patronale. Les fusions de branche bouleversent de nombreux équilibres et peuvent faire un certain nombre de déçus. Certains d’entre eux n’hésiteront pas à engager des actions contentieuses.

A titre l’illustration, une action contentieuse vient de donner lieu à une demande de QPC devant le Conseil d’Etat. Cette QPC soulève la question de la conformité du dispositif législatif de fusion forcée des branches professionnelles aux principes constitutionnels. Sont en particulier évoqués dans ce recours les principes :

  • de liberté contractuelle et au droit au maintien de l’économie des conventions légalement conclues,
  • de liberté syndicale,
  • de la liberté de la négociation collective,
  • de participation des salariés à la détermination collective de leurs conditions de travail,

Le 2 octobre 2019, le Conseil d’Etat a décidé de transmettre au Conseil constitutionnel cette QPC.

En l’état, le dispositif législatif sur la restructuration des branches souffre de quelques lacunes.

Au regard de la complexité technique et politique du sujet, il serait opportun que soit précisé le régime juridique de la restructuration des branches professionnelles.

Il s’agit d’éviter que le risque contentieux puisse s’infiltrer dans les brèches du dispositif. Sur un sujet de cette nature, le risque contentieux est important ; il apparaît donc essentiel de le limiter.