Statut collectif

La volonté affichée du Gouvernement de sécuriser le contentieux des accords collectifs de travail, comme les risques révélés par nombre de décisions de la Cour de cassation (forfait-jours, principe d’égalité, …) procédant à l’annulation de certaines clauses des conventions et accords collectifs de travail, doivent conduire à une réflexion… cet article présente une proposition de procédure de contrôle de légalité des conventions et accords collectifs de travail.

Proposition formulée par Capstan avocats

Quelle légitimité ?

Une telle procédure présente au moins deux intérêts majeurs :

  • assurer la cohérence avec le mouvement de décentralisation de la norme sociale. La généralité de l’accord collectif, ses effets erga omnes, le phénomène visant à faire de l’accord collectif un instrument de production de la norme sociale concourent à faire de l’accord, au moins dans son esprit, un équivalent de la loi. Allant au terme de la logique, le rapprochement devrait inspirer de profondes évolutions dans le contrôle.
  • éviter les risques liés à une annulation d’une clause alors que l’accord a produit des effets. L’accord collectif se rapproche sur ce point (encore) de la norme : le contentieux de l’accord collectif est un contentieux de masse (que l’accord intéresse l’entreprise ou la branche ; rapporté à son champ d’application, l’annulation présente toujours un enjeu considérable pour l’entreprise).

Quelles modalités ?

Tout comme le Conseil constitutionnel contrôle la conformité de la loi à la Constitution, une instance dotée de prérogatives juridictionnelles (la Cour de cassation, une instance attachée à la Cour de cassation, une instance arbitrale, …) contrôlerait la conformité de l’accord collectif à la loi. Dans ces conditions, à l’image du contrôle de constitutionnalité, deux voies (cumulatives) pourraient être proposées :

  • un contrôle a priori, c’est-à-dire une fois l’accord conclu mais avant l’entrée en vigueur de l’accord. La demande de contrôle (admise par exemple dans un délai de 15 jours suivant la signature de l’acte juridique) pourrait être formulée par une (ou plusieurs) organisation(s) non signataire(s) invoquant une illégalité de l’acte juridique. L’instance de contrôle disposerait d’un délai maximum (1 mois par exemple) pour se prononcer. A l’issue du contrôle, deux situations peuvent se présenter. Si le juge constate la légalité de l’accord, ce dernier entre en vigueur. En revanche, lorsque le juge constate l’illégalité d’une ou plusieurs clauses de l’accord, ce dernier est invalidé dans son ensemble (l’accord constituant un tout indivisible à défaut de divisibilité stipulée par les parties), l’invalidation étant assortie d’une obligation de renégocier (sans obligation de conclure) l’accord;
  • un contrôle a posteriori : pendant l’exécution de l’accord, à l’occasion d’un contentieux soit individuel, soit collectif, l’illégalité d’une clause de l’accord est invoquée. Le juge saisi suspend et renvoie la question devant l’instance créée à cet effet. En cas de constatation de l’illégalité, seule la clause est annulée ; par ailleurs, dans un souci de sécurité, l’instance serait dotée du pouvoir de limiter dans le temps les effets de l’illégalité (celle-ci ne valant que pour l’avenir). A l’image de la QPC, l’instance juridictionnelle pourrait reporter les effets de l’invalidation (afin d’inciter les parties à renégocier la clause litigieuse).

Une proposition qui entre parfaitement dans l’objectif de sécurisation.