Rupture

L’actualité récente nous a donné un exemple de démission ministérielle refusée dans un premier temps par le Président de la République, puis maintenue et finalement acceptée. Même si la logique d’acceptation semble en pareil cas relever davantage de la tradition républicaine et de la marque de respect envers le Président, il n’est pas inutile de se demander si une telle situation pourrait exister dans la relation de travail.

La réponse dépend ici de la nature du contrat de travail, selon qu’il a été conclu pour une durée déterminée (CDD) ou indéterminée (CDI).

L’IMPOSSIBLE « DEMISSION » DU SALARIE EN CDD

En matière de CDD, la démission (c’est-à-dire la rupture unilatérale à l’initiative du salarié) n’existe pas au sens strict du terme : ce que les parties ont convenu pour une durée limitée doit s’exécuter jusqu’au terme prévu. Les seuls aménagements à ce principe correspondent à deux situations définies par la loi, permettant au salarié de mettre unilatéralement un terme anticipé au contrat :

  • Il s’agit tout d’abord des ingénieurs ou cadres en CDD à objet défini (art. L. 1242-2 6°) qui peuvent rompre le contrat « pour un motif réel et sérieux », 18 mois après sa conclusion puis à la date anniversaire de sa conclusion. On observera que cette possibilité n’est pas marquée par une liberté totale, puisqu’elle exige de l’auteur de la rupture qu’il justifie d’un motif réel et sérieux.
  • Il s’agit ensuite, pour tous les salariés, de la justification d’une embauche en CDI qui permet de rompre unilatéralement et de manière anticipée le CDD en cours.

En dehors de ces deux hypothèses, le salarié en CDD « démissionnaire » est susceptible d’engager sa responsabilité vis à vis de l’employeur, qui peut solliciter le versement de dommages-intérêts à condition de pouvoir prouver la réalité et l’ampleur du préjudice que cette rupture illégitime lui occasionne.

LA LIBRE DEMISSION DU SALARIE EN CDI

En matière de CDI, la solution est rigoureusement inverse, puisque la démission est totalement libre, à n’importe quel moment de la relation de travail. Elle ne saurait donc être subordonnée à son acceptation préalable par l’employeur, quelle que soit l’importance des fonctions de son auteur pour l’entreprise.

En matière de CDI, la démission est totalement libre, à n’importe quel moment de la relation de travail.

Cette solution de liberté s’applique également lorsque le salarié s’est engagé à demeurer un certain temps dans l’entreprise (clause de dédit-formation par exemple). En effet, de tels engagements ne constituent pas des limitations à la liberté de démissionner : ils ne font qu’en régler les conséquences financières éventuelles. Ainsi, dans le cas d’une clause de dédit-formation, un dédommagement en contrepartie de l’engagement exorbitant assumé préalablement par l’employeur en matière de financement d’une formation. Le salarié peut donc toujours démissionner lorsqu’il le souhaite, charge à lui d’indemniser l’employeur de la fraction du coût de la formation qui n’aura pu être amortie en raison de sa trop brève présence, selon ce qui aura été préalablement convenu entre les parties.