Rupture

On le sait, il arrive fréquemment, dans le cadre de négociations, que des salariés demandent que le paiement de la somme convenue pour mettre fin au litige le soit par le biais d’un procès-verbal (PV) de conciliation, et non par le biais d’une indemnité transactionnelle versée dans le cadre d’un protocole d’accord transactionnel.

La limite : la renonciation aux litiges concernant l’exécution du contrat ?

Toutefois, certains employeurs pouvaient être réticents à accepter un PV de conciliation pour clore le litige car l’article L. 1235-1 du Code du travail, qui prévoit la possibilité de concilier, précise que ce PV emporte renonciation de toutes les parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail.

En conséquence, un doute subsistait quant à la possibilité de prévoir expressément dans le PV de conciliation une renonciation du salarié à tout litige concernant l’exécution du contrat de travail. Or, l’objectif de l’employeur, en signant un PV de conciliation était d’éteindre tout litige quel qu’en soit l’origine (exécution ou rupture).

Dans les faits, certaines formations de Conseils de prud’hommes ont même refusé de signer un projet de PV de conciliation emportant renonciation du salarié concernant l’exécution du contrat de travail.

Un éclairage bienvenu !

Dans une affaire jugée le 24 avril dernier par la Cour de cassation (Cass. soc., 24 avril 2024, n°22-20.472, FS-B), un PV de conciliation avait été régularisé entre un employeur et son salarié et prévoyait une renonciation à toute réclamation découlant du contrat de travail. Le salarié a par la suite saisi le juge pour obtenir le paiement d’une contrepartie financière à la clause de non-concurrence. Il soutenait que le PV de conciliation ne peut emporter renonciation que s’agissant de la rupture du contrat de travail, et non de son exécution.

La Cour de cassation rejette cet argument et considère que le bureau de conciliation et d’orientation conserve une compétence d’ordre général pour régler tout différend né à l’occasion du contrat de travail. En conséquence, les parties peuvent librement étendre l’objet de leur conciliation à des questions dépassant celles des seules indemnités de rupture.

Un bémol ?

C’est une décision qui doit être évidemment saluée et qui devrait clore le débat relatif au périmètre du procès-verbal de conciliation.

Un bémol subsiste : dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de la Cour de cassation, les parties ont choisi de faire référence aux dispositions du code civil relatives au protocole d’accord transactionnel. Outre que cela n’est pas recommandé, car cela met à risque le régime fiscal de faveur attaché au PV de conciliation, on peut s’interroger : la solution aurait-elle été différente sans cette référence textuelle ?

A notre sens, tel n’est pas le cas. Cette décision doit permettre en toute logique aux employeurs de bénéficier d’une meilleure sécurité juridique. Il n’existe donc aucun obstacle à ce qu’employeurs et salariés concilient devant le Conseil de prud’hommes. Cela est bienvenu et renforce la pertinence de l’étape préalable de conciliation devant le juge prud’homal.