Rupture

Dans le cas où l’autorité administrative est saisie d’une demande d’autorisation de licenciement pour faute d’un salarié protégé auquel il est reproché d’avoir signalé des faits répréhensibles, il lui appartient de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si les faits dénoncés sont susceptibles de recevoir la qualification de crime ou de délit, si le salarié en a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et s’il peut être regardé comme ayant agi de bonne foi. Lorsque ces trois conditions sont remplies, l’autorité administrative doit refuser d’autoriser ce licenciement.

En outre, si les dispositions du code du travail, prévoient un aménagement des règles de dévolution de la preuve lorsqu’un salarié conteste des mesures défavorables prises à son encontre en faisant valoir qu’elles sont, en réalité, motivées par une déclaration ou un témoignage effectué de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, ces dispositions sont sans application lorsque la mesure contestée par le salarié est expressément fondée sur ce signalement. Dans le cas où il est saisi de la légalité d’une décision prise par l’autorité administrative sur une demande d’autorisation d’un licenciement expressément motivée par un tel signalement, il appartient au juge de l’excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu de l’ensemble des éléments versés au dossier par les parties, le cas échéant après avoir mis en œuvre ses pouvoirs généraux d’instruction des requêtes.

En l’espèce, les accusations d’une particulière gravité proférées par le salarié dans les courriers électroniques sont formulées en des termes généraux et outranciers, sans que l’intéressé ait été par la suite en mesure de les préciser d’aucune manière. Elles s’inscrivent, en outre, dans le cadre d’une campagne de dénigrement dirigée contre son ancien supérieur hiérarchique direct, se traduisant par la mise en cause répétée de celui-ci pour des pratiques illégales que le salarié n’a jamais étayées par le moindre élément factuel, en n’ayant, par exemple, pas donné suite à la demande de précision de la direction de l’éthique qu’il avait saisie, en des termes allusifs, d’accusations de fraude. Le salarié ne peut, dans ces conditions, être regardé comme ayant agi de bonne foi.

Il en résulte que le salarié ne peut se prévaloir de la protection applicable aux lanceurs d’alerte prévues par le code du travail et n’est par suite pas fondé à soutenir que la ministre aurait autorisé son licenciement en méconnaissance de ces dispositions.

CE, 8 décembre 2023, n°435266