IRP

Par une décision du 25 octobre 2023 (Cass. soc., 25 octobre 2023, 23-14.147), la Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur l’article L. 3326-1 du Code du travail qui rend impossible la remise en cause par un salarié, une organisation syndicale, ou le CSE, du montant du bénéfice net et celui des capitaux propres de l’entreprise établis par une attestation de l’inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes.

Les requérants reprochent à ces dispositions, telles qu’interprétées par la jurisprudence constante de la Cour de cassation (voir notamment Cass. soc., 9 février 2010, n° 08-11.338 ; Cass. soc., 8 décembre 2010, n° 09-65.810), de faire obstacle à toute remise en cause des montants figurant sur l’attestation établie par le commissaire aux comptes ou l’inspecteur des impôts, alors que la réserve spéciale de participation des salariés est calculée sur la base de ces montants. Elles priveraient ainsi les salariés de la possibilité de contester le calcul de cette réserve, y compris lorsque la fraude ou l’abus de droit sont invoqués à l’encontre d’actes de gestion. Il en résulterait une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif.

Pour le Conseil constitutionnel :

  • Cette attestation a pour seul objet de garantir la concordance entre le montant du bénéfice net et des capitaux propres déclarés à l’administration fiscale et celui utilisé par l’entreprise pour le calcul de la réserve spéciale de participation. Ainsi, le législateur a entendu éviter que les montants déclarés par l’entreprise et vérifiés par l’administration fiscale, sous le contrôle du juge de l’impôt, puissent être remis en cause, devant le juge de la participation, par des tiers à la procédure d’établissement de l’impôt. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d’intérêt général.
  • L’administration fiscale, qui contrôle les déclarations effectuées pour l’établissement des impôts, peut, le cas échéant sur la base de renseignements portés à sa connaissance par un tiers, contester et faire rectifier les montants déclarés par l’entreprise au titre du bénéfice net ou des capitaux propres, notamment en cas de fraude ou d’abus de droit liés à des actes de gestion. Dans ce cas, une attestation rectificative est établie aux fins de procéder à un nouveau calcul du montant de la réserve spéciale de participation.

Les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à un recours juridictionnel effectif. Ces dispositions, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.

Conseil Constitutionnel, décision n° 2023-1077 QPC du 24 janvier 2024

Sur ce sujet, voir « Bénéfice fiscal utilisé pour le calcul de la participation : une QPC pour quoi faire ?« , par Arnaud TEISSIER, avocat associé, et Boris MUNIZ, avocat, La Semaine juridique social, 28 novembre 2023 (réservé aux abonnés).