La loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a instauré le principe de la mutualisation du suivi de l’état de santé des travailleurs occupant des emplois identiques pour le compte de plusieurs employeurs.
Ce principe est effectif depuis l’entrée en vigueur du décret n° 2023-547 du 30 juin 2023 relatif au suivi de l’état de santé des travailleurs ayant plusieurs employeurs.
Remarque
Le décret a expressément prévu une entrée en vigueur au 1er janvier 2024 des dispositions relatives aux modalités de répartition du coût de la mutualisation du travailleur entre les employeurs.
Pour l’année 2023, il était prévu que si le service de prévention et de santé au travail de l’employeur principal constatait qu’un ou plusieurs travailleurs employés au sein de ses entreprises adhérentes relevaient d’un suivi mutualisé au 31 juillet 2023, la cotisation due à ce titre était répartie à parts égales entre les employeurs du ou des travailleurs concernés, notamment sous la forme d’un avoir pour l’année 2024. Au-delà du 31 juillet 2023, il ne devait pas être procédé au recouvrement d’une cotisation complémentaire pour tout travailleur donnant lieu à un suivi mutualisé au titre de l’année 2023.
TRAVAILLEURS MULTI-EMPLOYEURS, EMPLOYEUR PRINCIPAL : DEFINITIONS
Pour l’application de ce dispositif, est réputé comme occupant des emplois identiques pour le compte de plusieurs employeurs, le travailleur qui exécute simultanément au moins deux contrats de travail (CDD ou CDI) qui l’occupent à des emplois relevant de la même CSP et du même type de suivi de l’état de santé (ordinaire, adapté ou renforcé).
En pratique, la mutualisation signifie que le suivi de l’état de santé du travailleur est assuré, non plus par chacun des Services de Prévention et de Santé au Travail Interentreprises (SPSTI) dont relèvent, à titre principal, ses différents employeurs, mais par le SPSTI de son employeur principal, auquel doivent adhérer ses autres employeurs pour ce qui le concerne.
L’employeur principal du travailleur s’entend de celui avec lequel il entretient la relation contractuelle la plus ancienne.
COMMENT L’EMPLOYEUR ET LE SPSTI SONT-ILS INFORMES DU STATUT DU SALARIE ?
La mutualisation suppose, par définition, que le statut de travailleur occupant des emplois identiques pour le compte de plusieurs employeurs ne soit pas connu que du seul travailleur lui-même.
A ce titre, le décret du 30 juin 2023 institue des moyens de transfert de l’information en prévoyant :
- que, depuis le 2 juillet 2023, tout employeur peut demander à un travailleur de l’informer de la conclusion d’autres contrats de travail auprès d’un ou plusieurs autres employeurs pendant la durée de son contrat, afin qu’il en informe, le cas échéant, son SPSTI ;
- que, depuis le 1er janvier 2024, tout SPSTI peut demander à ses entreprises adhérentes de lui transmettre, avant le 28 février de chaque année, la liste nominative des travailleurs exécutant simultanément au moins deux contrats de travail arrêtée au 31 janvier de l’année en cours.
Telles que libellées, les dispositions réglementaires ne contraignent personne à aller chercher l’information.
Il revient donc à chaque employeur de décider, et ce même s’il est sollicité par le SPSTI auquel il adhère, d’interroger ou non ses travailleurs. S’il le fait, libre ensuite à lui de communiquer à son SPSTI les informations qu’il a pu obtenir.
L’intérêt pour l’employeur est potentiellement de pouvoir partager le coût de la cotisation annuelle due au titre d’un travailleur dont il est l’employeur principal ou « secondaire » avec les autres employeurs de celui-ci et donc de réaliser une économie de charges. L’intérêt est ainsi, de fait, plus fort pour l’employeur qui emploie de manière conséquente, que ce soit en nombre et/ou en proportion de ses effectifs, des salariés à temps partiel.
L’intérêt est aussi, d’une manière indirecte, d’exiger de ses travailleurs des informations qu’il ne peut solliciter autrement et qui peuvent le renseigner sur une situation de cumul d’emplois dont il ignorait tout.
Du côté des SPSTI, se pose la question de savoir s’ils vont se saisir de la possibilité qui leur est offerte de solliciter de leurs adhérents la liste nominative de leurs travailleurs exécutant simultanément au moins deux contrats de travail.
A QUOI DOIVENT S’ATTENDRE LES EMPLOYEURS ?
En l’état, tout employeur doit néanmoins s’attendre à être, le cas échéant :
- invité par le SPSTI auquel il adhère à titre principal à lui transmettre, avant le 28 février de cette année, la liste nominative des travailleurs exécutant simultanément au moins deux contrats de travail arrêtée au 31 janvier de l’année en cours, invitation à laquelle il n’est pas tenu de répondre ;
- informé par le SPSTI auquel il adhère à titre principal :
- de son statut d’employeur principal d’un travailleur et du partage de sa cotisation annuelle au titre de ce travailleur avec ses autres employeurs ;
- ou de son statut d’employeur « secondaire » d’un travailleur et de la fin du suivi de ce dernier par ses soins au motif que l’employeur principal du travailleur relève d’un autre SPSTI ;
- informé par un SPSTI auquel il n’adhérait jusqu’alors pas, de son statut d’employeur « secondaire » d’un travailleur, et invité par lui à adhérer à ses services au titre de ce dernier, ce à quoi il ne pourra pas s’opposer sauf à se placer en infraction.
Sur ce thème, voir aussi le « Questions-Réponses relatif au suivi de l’état de santé des salariés ayant une pluralité d’employeurs (Ministère du travail) »