Rupture

En raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté fondamentale de témoigner, garantie d’une bonne justice, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié dans le cadre d’une instance judiciaire, est atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur, laquelle ne peut résulter que de la connaissance qu’il avait de la fausseté des faits relatés.

En l’espèce,  la salariée a adressé, en décembre 2017, un rapport à son employeur dans les termes suivants « Par la présente, je souhaite vous informer de différents faits et comportements de certains de mes collaborateurs qui nuisent à l’ambiance au sein de l’équipe et donc au bon fonctionnement du magasin. (…) ils font tout pour me déstabiliser et me démotiver. Je dois sans cesse être derrière eux, plus spécialement [L] [Y], afin qu’ils soient à leur poste et qu’ils servent les clients. Lors de l’inventaire du 9 octobre, [D] [C] et [L] [Y] ont refusé de commencer à 7 h du matin et de finir à 19 h ; aucun ne se sent impliqué : personne n’est volontaire pour travailler les dimanches avant Noël !! Aucune conscience professionnelle : depuis le 25 novembre [D] [C] et [L] [Y] sont en arrêt de travail (…) ; L’ambiance est glaciale, pas de sourire, pas de dialogue… Ces différentes attitudes, en plus d’être un manque de professionnalisme, nuisent gravement au magasin, à son bon fonctionnement et surtout à son chiffre d’affaires. »

En juin 2018, cette salariée établit une attestation pour son collègue ayant fait l’objet d’une procédure de licenciement, en écrivant : « M. [Y] n’a commis aucune faute grave pendant son activité en magasin. Les accusations portées contre lui ne sont aucunement justifiées. Il est un vendeur exemplaire apprécié de la clientèle. ». La salariée est ensuite licenciée pour faute grave en raison du contenu de cette attestation.

Ce licenciement est approuvé par le juge d’appel, pour lequel le témoignage de la salariée procède de la mauvaise foi dans la mesure où elle savait que son subordonné avait été licencié pour faute grave motivée, entre autre, par ses actes d’insubordination à son égard et sur la base de son rapport établi seulement une vingtaine de jours auparavant.

A tort selon la Cour de cassation : le juge du fond, qui n’a pas constaté le bien-fondé des griefs énoncés dans le rapport de décembre 2017 signé par la salariée, a utilisé des motifs impropres à caractériser la connaissance par la salariée de la fausseté des faits relatés.

Cass. soc. 14 juin 2023, n°22-16.977