Conditions de travail

Communiqué de la Cour de cassation

Les faits

Une compagnie aérienne a établi un manuel du port de l’uniforme à destination de son personnel navigant.

Ce manuel donne des consignes relatives à la coiffure :

  • pour les hommes : « Les cheveux doivent être coiffés de façon extrêmement nette. Limitées en volume, les coiffures doivent garder un aspect naturel et homogène. La longueur est limitée dans la nuque au niveau du bord supérieur de la chemise. »
  • pour les femmes : « Les tresses africaines sont autorisées à condition d’être retenues en chignon. »

L’un des stewards de cette compagnie portait des tresses africaines nouées en chignon : il a été sanctionné pour avoir refusé de respecter les règles établies par le manuel, puis a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement au sein de l’entreprise.

La procédure

Le steward licencié a estimé être victime de discrimination : à ce titre, il a réclamé des dommages-intérêts.

Le conseil de prud’hommes puis la cour d’appel ont rejeté sa demande.

Il a été jugé que :

  • la présentation du personnel navigant faisait partie de l’image de marque de la compagnie aérienne ;
  • cette image de marque imposait le port de l’uniforme ;
  • la différence de coiffure entre homme et femme reposait sur des codes en usage.

La question posée à la Cour de cassation

Le fait pour un employeur de restreindre la liberté de ses salariés de sexe masculin dans leur façon de se coiffer constitue-t-il une discrimination fondée sur le sexe ?

La décision de la Cour de cassation

Repères : Des différences de traitement sous certaines conditions

Le code du travail

Le code du travail interdit de licencier ou de sanctionner un salarié pour des motifs discriminatoires tels que le sexe.

Toutefois, il autorise des différences de traitement lorsqu’elles répondent à des exigences professionnelles essentielles et déterminantes. L’objectif recherché par l’employeur doit alors être légitime et les exigences imposées aux salariés proportionnées.

La jurisprudence

La jurisprudence précise que les exigences qui pèsent sur le salarié doivent être dictées par la nature ou les conditions d’exercice objectives de l’emploi. Ces exigences ne peuvent répondre à des considérations subjectives telles que la volonté de l’employeur de tenir compte de souhaits particuliers des clients.

La différence de traitement qui consiste à autoriser les femmes à porter des tresses africaines attachées en chignon mais à l’interdire aux hommes est uniquement fondée sur le sexe du salarié : elle n’est justifiée par aucune exigence essentielle et déterminante propre à l’exercice de la profession de steward.

D’une part, c’est l’uniforme qui permet aux clients d’identifier le personnel navigant. Contrairement à un chapeau, dont le port peut être imposé et qui contribue à cette identification, la manière de se coiffer n’est ni une partie de l’uniforme ni son prolongement.

D’autre part, les codes sociaux ne sont pas des critères objectifs qui justifient une différence de traitement entre les hommes et les femmes. La prise en compte d’une perception sociale courante de l’apparence physique des genres masculin et féminin n’est pas une exigence objective nécessaire à l’exercice des fonctions de steward.

Dans le cadre de cette profession, il n’est donc pas possible d’interdire aux hommes une coiffure autorisée aux femmes.

La Cour de cassation casse la décision de cour d’appel.

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