Conditions de travail

Au JO de ce 3 août, est parue la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail. Elle prévoie de très nombreuses dispositions, qui ont notamment pour objet de renforcer la prévention en santé au travail et de moderniser les services de prévention et de santé au travail.

Dans un communiqué du 23 juillet (date de l’adoption définitive du texte par le Parlement), la Ministre du travail a indiqué que « Ce texte est le fruit d’un processus de démocratie sociale et parlementaire souhaité par le Gouvernement avec la conclusion le 9 décembre 2020 par les partenaires sociaux d’un accord national interprofessionnel (ANI) pour renforcer l’approche préventive et renouveler l’offre en matière de santé au travail. La proposition de loi adoptée donne toute sa force juridique à cet accord. Elle permet de faire évoluer le système de santé au travail pour répondre aux enjeux actuels des entreprises et de leurs salariés notamment par le renforcement de la prévention au sein des entreprises, la modernisation des services de prévention et de santé au travail qui proposeront des offres de services homogènes et de qualité, soumises à une certification ou encore l’ouverture à certains publics vulnérables d’une prise en charge en santé au travail. ».

Nous vous présentons quelques unes de ses dispositions.

Entrée en vigueur

La loi précise que, sauf disposition contraire, elle entre en vigueur le 31 mars 2022.

Harcèlement sexuel

Définition

La définition du harcèlement sexuel par le code du travail est rapprochée de celle du code pénal (art. 222-33). En effet, celui-ci a été modifié en dernier lieu en 2018 pour y intégrer les propos et comportements à connotation sexiste, ce qui n’a pas été fait dans le code du travail.

L’article L.1153-1 du Code du travail est donc ainsi modifié :

« Aucun salarié ne doit subir des faits :

1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle « ou sexiste » répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

Le harcèlement sexuel est également constitué :

« a) Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de  l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;

« b) Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de  concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ; »

2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. »

Formation des IRP et du référent harcèlement sexuel

Les membres de la délégation du personnel du CSE et le référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes bénéficient de la formation nécessaire à l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. La formation est d’une durée minimale de 5 jours lors du premier mandat des membres de la délégation du personnel.

En cas de renouvellement de ce mandat, la formation est d’une durée minimale :

  • de 3 jours pour chaque membre de la délégation du personnel, quelle que soit la taille de l’entreprise ;
  • de 5 jours pour les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail dans les entreprises d’au moins 300 salariés

Création d’une visite médicale de mi-carrière

La loi crée un nouvel article L. 4624-2-2 au sein du code du travail, aux termes duquel les travailleurs bénéficient d’une visite médicale de mi-carrière.

Quand ?. – Le travailleur est examiné par le médecin du travail au cours d’une visite médicale de mi-carrière organisée à une échéance déterminée par accord de branche ou, à défaut, durant l’année civile du 45e anniversaire du travailleur.

Cet examen médical peut être anticipé et organisé conjointement avec une autre visite médicale lorsque le travailleur doit être examiné par le médecin du travail deux ans avant l’échéance prévue ci-dessus. Il peut être réalisé dès le retour à l’emploi du travailleur dès lors qu’il satisfait aux conditions déterminées par l’accord de branche ou, à défaut, qu’il est âgé d’au moins 45 ans.

Dans quels buts ?. – L’examen médical vise à :

  • établir un état des lieux de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du travailleur, à date, en tenant compte des expositions à des facteurs de risques professionnels auxquelles il a été soumis ;
  • évaluer les risques de désinsertion professionnelle, en prenant en compte l’évolution des capacités du travailleur en fonction de son parcours professionnel, de son âge et de son état de santé ;
  • sensibiliser le travailleur aux enjeux du vieillissement au travail et sur la prévention des risques professionnels.

Le médecin du travail peut proposer, par écrit et après échange avec le travailleur et l’employeur, les mesures prévues à l’article L. 4624-3 (mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge ou à l’état de santé physique et mental du travailleur).

Aménagement des modalités de l’organisation du retour des travailleurs à leur poste après une absence de longue durée

Rendez-vous de liaison

Lorsque la durée de l’absence au travail du salarié justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident, constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, est supérieure à une durée fixée par décret, la suspension du contrat de travail ne fait pas obstacle à l’organisation d’un rendez-vous de liaison entre le salarié et l’employeur, associant le service de prévention et de santé au travail.

Objet. – Ce rendez-vous a pour objet d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, de l’examen de préreprise et des mesures individuelles telles que aménagement, d’adaptation ou transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à son âge ou à son état de santé physique et mental.

Initiative. – Il est organisé à l’initiative de l’employeur ou du salarié. L’employeur informe celui-ci qu’il peut solliciter l’organisation de ce rendez-vous. Aucune conséquence ne peut être tirée du refus par le salarié de se rendre à ce rendez-vous.

Visite de reprise

Après un congé de maternité ou une absence au travail justifiée par une incapacité résultant de maladie ou d’accident et répondant à des conditions fixées par décret, le travailleur bénéficie d’un examen de reprise par un médecin du travail dans un délai déterminé par décret.

Examen de préreprise

En cas d’absence au travail justifiée par une incapacité résultant de maladie ou d’accident d’une durée supérieure à une durée fixée par décret, le travailleur peut bénéficier d’un examen de préreprise par le médecin du travail, notamment pour étudier la mise en œuvre des mesures d’adaptation individuelles prévues à l’article L. 4624-3, organisé à l’initiative du travailleur, du médecin traitant, des services médicaux de l’assurance maladie ou du médecin du travail, dès lors que le retour du travailleur à son poste est anticipé.

L’employeur informe le travailleur de la possibilité pour celui-ci de solliciter l’organisation de l’examen de préreprise.

Changement de dénomination des services de santé au travail

L’ensemble des services de santé au travail sont renommés en « services de prévention et de santé au travail » (SPST).

Selon le rapport du Sénat (n° 706 du 23 juin 2021) l’accord national interprofessionnel (ANI) pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail conclu le 10 décembre 2020 a proposé une nouvelle dénomination pour les services de santé au travail interentreprises : celle de « services de prévention et de santé au travail interentreprises » (SPSTI), les partenaires sociaux ayant affirmé leur résolution à « mettre la prévention primaire au cœur de notre système de santé au travail ».

La loi prend acte de ce changement de dénomination en modifiant l’intitulé de l’ensemble des SST, qu’ils soient interentreprises ou autonomes.

Extension des missions des SPST

La loi étend les missions des services de prévention et de santé au travail à l’accompagnement dans l’évaluation des risques professionnels et à la promotion de la santé sur le lieu de travail, dans un objectif de décloisonnement de la santé au travail et de la santé publique. Il est désormais prévu qu’ils :

  • contribuent à la réalisation d’objectifs de santé publique afin de préserver, au cours de la vie professionnelle, un état de santé du travailleur compatible avec son maintien en emploi ;
  • apportent leur aide à l’entreprise, de manière pluridisciplinaire, pour l’évaluation et la prévention des risques professionnels ;
  • conseillent les employeurs, les travailleurs et leurs représentants notamment sur les dispositions et mesures nécessaires afin d’éviter ou de diminuer les risques professionnels, d’améliorer la qualité de vie et des conditions de travail, en tenant compte le cas échéant de l’impact du télétravail sur la santé et l’organisation du travail ;
  • accompagnent l’employeur, les travailleurs et leurs représentants dans l’analyse de l’impact sur les conditions de santé et de sécurité des travailleurs de changements organisationnels importants dans l’entreprise ;
  • participent à des actions de promotion de la santé sur le lieu de travail, dont des campagnes de vaccination et de dépistage, des actions de sensibilisation aux bénéfices de la pratique sportive et des actions d’information et de sensibilisation aux situations de handicap au travail, dans le cadre de la stratégie nationale de santé au code de la santé publique.

Offre de service à fournir par les SPST aux entreprises et aux salariés

Socle de services. – Le SPSTI fournit à ses entreprises adhérentes et à leurs travailleurs un ensemble socle de services qui doit couvrir l’intégralité des missions prévues à l’article L. 4622-2 en matière de prévention des risques professionnels, de suivi individuel des travailleurs et de prévention de la désinsertion professionnelle, dont la liste et les modalités sont définies par le comité national de prévention et de santé au travail et approuvées par voie réglementaire. En l’absence de décision du comité, à l’issue d’un délai déterminé par décret, cette liste et ces modalités sont déterminées par décret.  Pour assurer l’ensemble de leurs missions, les SPST autonomes (SPSTA) peuvent, par convention, recourir aux compétences des SPSTI.

Services complémentaires. – Dans le respect des missions générales prévues au même article L. 4622-2, il peut également leur proposer une offre de services complémentaires qu’il détermine.

Certification. – Chaque service de prévention et de santé au travail interentreprises fait l’objet d’une procédure de certification, réalisée par un organisme indépendant visant à porter une appréciation à l’aide de référentiels notamment sur :

  • la qualité et l’effectivité des services rendus dans le cadre de l’ensemble socle de services ;
  • l’organisation et la continuité du service ainsi que la qualité des procédures suivies ;
  • la gestion financière, la tarification et son évolution.