Depuis la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 les entreprises sont tenues d’organiser et de tracer des entretiens professionnels avec leurs salariés.

En pratique, on constate que l’obligation d’échanger avec chacun des salariés sur son parcours professionnel au moins tous les 2 ans, et selon une formule plus complète tous les 6 ans, a été globalement bien respectée dans les entreprises comptant plus de 50 salariés.

A noter que des sanctions financières plutôt lourdes prévues en cas de non-respect de cette obligation pour les entreprises ayant ou dépassant cet effectif (abondement d’un montant de 3 000 € du CPF de chaque salarié concerné, C. trav. art. L. 6323-13) ont sans doute – pour partie – contribué à assurer le respect des prescriptions légales.

L’absence d’entretien, un préjudice pour le salarié ?

L’absence d’entretien professionnel peut causer au salarié un préjudice, qu’il lui faudra toutefois démontrer (CA Versailles,19 mai 2021, n°19/00371).

Il a par exemple été retenu une absence de préjudice si, en l’absence d’entretiens professionnels, l’employeur établit avoir fait délivrer des formations à la salariée, celle-ci ne démontrant pas avoir subi un préjudice d’adaptation à l’emploi ou de carrière tout en ayant au contraire bénéficié d’une progression salariale et professionnelle (CA Paris, 21 septembre 2022, n°20/02407).

A contrario, il a déjà été jugé que  « L’employeur ne peut valablement soutenir que le salarié n’aurait subi aucun préjudice, dès lors que l’absence de ces entretiens professionnels lui a causé un préjudice résultant de l’absence de possibilité de construire des perspectives d’évolution professionnelle en les inscrivant dans le cadre de la relation de travail. » (CA Grenoble, 7 novembre 2023, n°21/04334).

On constate toutefois en pratique que quelques dysfonctionnements subsistent parfois dans la mise en œuvre des entretiens. Ainsi, il peut arriver qu’un temps insuffisant soit pris pour faire le point sur les formations souhaitables, et souhaitées par le salarié, ou encore qu’entretiens d’évaluation et entretiens professionnels ne soient pas suffisamment distingués l’un de l’autre. Or, si la Cour de cassation estime que le code du travail (art. L. 6315-1, I) ne s’oppose pas à la tenue à la même date de l’entretien d’évaluation et de l’entretien professionnel, c’est à la condition que lors de la tenue de ce dernier, les questions d’évaluation ne soient pas évoquées (Cass. soc., 5 juillet 2023, n°21-24.122).

Remarque

Si les obligations relatives aux entretiens professionnels sont pour l’instant plutôt légèrement sanctionnées par Cour de Cassation, il convient de rester vigilant : l’exemple de l’entretien annuel de charge de travail pour les forfaits en jours est à cet égard très éloquent (voir Cass. soc., 17 février 2021, n°19-15.215).

La mise en œuvre de l’obligation d’organiser des entretiens professionnels peut donc encore être améliorée, en particulier pour les entreprises de moins de 300 salariés, peu habituées aux négociations sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (C. trav., art. L. 2240-20 et s.).

L’obligation de tenir et de rendre compte d’entretiens professionnels de qualité avec chacun des salariés est avant tout une opportunité pour les entreprises dans la gestion de leurs ressources humaines. C’est pourquoi elles ont intérêt à s’en saisir et à améliorer autant que possible les processus mis en place.

En effet par exemple, l’âge de la retraite repoussé à 64 ans imposera une vie au travail plus longue, avec l’obligation de rester adapté à son emploi malgré son âge grandissant, et des capacités physiques moindres. Afin de respecter leur obligation d’assurer l’employabilité des salariés, mais également d’éviter une multiplication des accidents du travail (ainsi que les coûts associés), les entreprises doivent dès maintenant construire les parcours professionnels qui permettront aux salariés âgés de rester en poste à des fonctions adaptées à leurs capacités.

L’entretien professionnel, consacré aux perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualification et d’emploi, est ici l’outil idéal. Il permet d’envisager les évolutions possibles et les moyens de formation associés.