IRP

Après des temps d’incertitude jurisprudentielle, la loi du 20 août 2008 a clarifié les règles de participation au processus électoral des salariés mis à disposition.

Sous réserve d’une condition de présence minimale dans l’entreprise utilisatrice, ils pouvaient y être :

  • électeurs et éligibles aux élections des DP ;
  • électeurs aux élections des membres du CE.

Afin d’éviter les situations de « double-votes » dans leur entreprise d’origine et dans l’entreprise utilisatrice, les intéressés devaient néanmoins choisir celle des deux où ils souhaitaient exercer leurs droits électoraux.

Règles issues de la loi de 2008 : une mise en œuvre complexe

La complexité de mise en œuvre initiale de ces règles avait suscité une importante jurisprudence.

La Cour de cassation avait notamment jugé que c’est à la date des élections dans l’entreprise utilisatrice que les salariés devaient être en mesure d’exercer leur d’option (Cass. soc. 26 mai 2010, n° 09-60.400). Autrement dit, lors des 1ères élections ayant suivi l’entrée en vigueur de la loi du 20 août 2008, le droit d’option ne pouvait être valablement exercé qu’à l’occasion de celles organisées dans l’entreprise utilisatrice, peu important que les intéressés aient déjà voté dans leur entreprise d’origine. Le choix du salarié valait ensuite pour toute la durée du cycle électoral.

Des règles adaptées au CSE par l’une des ordonnances Macron

Si elle n’en a pas fondamentalement modifié la teneur, l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 a quelque peu modifié ces dispositions pour les adapter au CSE.

Ainsi, les salariés mis à disposition ne peuvent être qu’être électeurs au CSE de l’entreprise utilisatrice et n’y sont en revanche pas éligibles.

Les salariés mis à disposition ne peuvent être qu’être électeurs au CSE de l’entreprise utilisatrice et n’y sont en revanche pas éligibles. Le « double-vote » demeure proscrit.

Le « double-vote » demeure proscrit et les salariés doivent donc toujours choisir d’exercer leur droit de vote, soit dans l’entreprise utilisatrice, soit dans celle qui les emploie (C. trav., art. L.2314-23).

De même qu’elle l’avait été immédiatement après l’adoption de la loi du 20 août 2008, la Cour de cassation a été récemment saisie de la question de la date d’exercice du droit d’option dont il convient de tenir compte pour la première mise en place du CSE.

Quelle date d’exercice du droit d’option prendre en compte pour la 1ère mise en place du CSE ?

En l’occurrence, un salarié avait exercé son droit de vote aux élections des DP organisées en 2016 par l’entreprise utilisatrice. En 2018, son employeur a refusé de l’inscrire sur ses listes électorales dans la perspective de la mise en place prochaine du CSE.

Estimant que le choix effectué par le salarié en 2016 valait pour tout le cycle électoral, c’est-à-dire pour les 4 années suivantes, le tribunal d’instance a donné raison à l’employeur.

La Cour de cassation a censuré cette décision en écartant toute référence au cycle et en se fondant sur les changements que l’instauration du CSE avait entraînés sur les droits électoraux des salariés mis à disposition. Or, au moment où ces derniers avaient effectué leur choix en 2016, ils ignoraient nécessairement les évolutions législatives à venir et, partant, les conséquences qu’impliquerait leur décision sur leurs droits futurs.

La Cour a ainsi jugé que le droit d’option exercé par un salarié mis à disposition, en application d’un texte légal désormais abrogé qui l’autorisait à être électeur et éligible dans son entreprise d’accueil, ne pouvait lui être opposé pour refuser son éligibilité au CSE mis en place au sein de son entreprise d’origine, dès lors que l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 22 septembre 2017 ne lui permettait plus d’être éligible dans son entreprise d’accueil (Cass. soc. 13 février 2019 n° 18-60.149).

Il se trouve que dans cette affaire, le salarié ne s’était pas porté candidat aux élections des DP de l’entreprise utilisatrice. Néanmoins, au vu de la motivation de la Cour de cassation, la solution aurait probablement été identique si tel avait été le cas.

En l’état, il faut donc considérer que l’option exercée par les salariés mis à disposition dans le cadre de l’élection des anciennes instances (CE et/ou DP) ne vaut plus pour le CSE. Dit plus prosaïquement, les compteurs sont remis à zéro.

Combiné avec le principe qu’elle avait énoncé en 2010, ce nouvel arrêt de la Cour de cassation pourrait conduire à devoir distinguer deux hypothèses :

  • Cas 1 : les 1ères élections du CSE au sein de l’entreprise d’origine précédent celles organisées dans l’entreprise utilisatrice. Le salarié exercera normalement ses droits électoraux chez son employeur. Lors de la mise en place du CSE chez l’utilisateur, le salarié pourra décider d’y être électeur sans que puisse lui être opposée sa participation aux élections du CSE de son entreprise d’appartenance. Son choix l’engagera alors pour toute la durée du cycle électoral ;
  • Cas 2 : les 1ères élections du CSE au sein de l’entreprise utilisatrice précédent celles organisées dans l’entreprise d’origine. Le salarié devra exercer son option lors de la mise en place du CSE dans l’entreprise utilisatrice. S’il décide d’y électeur, son choix l’ayant engagé pour toute la durée du cycle électoral, il ne pourra pas voter aux 1ères élections du CSE organisées par son employeur.