Rupture

La rupture conventionnelle est un accord qui permet à l’employeur et au salarié de se délier des liens du contrat de travail. Ce dispositif n’a jamais été autant utilisé et, pour la seule année 2018, 10 ans après sa création, plus de 430 000 ruptures conventionnelles ont été mises en œuvre.

Bien que devant faire l’objet d’une homologation par l’administration du travail, la rupture conventionnelle a, d’abord et avant tout, la nature d’un contrat de droit privé dont la mise en œuvre doit, comme le rappelle le Code du travail, « garantir la licéité du consentement des parties ». Ce consentement, notamment celui du salarié, n’est définitivement acquis qu’au terme d’un délai de rétractation de 15 jours courant à compter de la signature de la convention par les deux parties.

A l’expiration de ce délai la demande d’homologation peut être mise en œuvre par la partie la plus diligente, mais en pratique c’est généralement l’employeur qui prend l’initiative du dépôt auprès de l’autorité administrative.

L’APPORT DES ARRETS DU 3 JUILLET 2019

Pour être homologué, le document déposé doit nécessairement comporter la signature de l’employeur et du salarié précédée de la mention manuscrite « lu et approuvé ». De fait, on peut considérer que le consentement des parties a été donné de façon éclairée entraînant la validation du contenu de la convention de rupture conventionnelle et de ses effets.

Dans le processus légal ne figure pas, tout du moins de façon explicite, l’obligation d’établir la convention de rupture en au moins autant d’exemplaires originaux que de parties, pas plus que n’est mentionné le processus de remise de ces documents à leur destinataire. Ainsi le formulaire CERFA qui sert à formaliser le contenu de la convention, son processus de mise en œuvre et l’accord des parties, est présumé être établi en au moins deux exemplaires originaux (généralement 3 ou 4 notamment pour les besoins du dépôt administratif) dont un est remis à chacune des parties.

Dans deux arrêts du 3 juillet 2019 (Cass. soc., 3 juillet 2019, n° 17-14.232 et n° 18-14.414) la Cour de cassation vient encadrer cette présomption et lui donner une portée juridique non négligeable.

Elle précise dans ses attendus que, quand bien même il n’est pas indiqué (dans le CERFA) que chacun des exemplaires a été effectivement remis à chaque partie, « il doit être présumé que tel est bien le cas ». A défaut, elle légitime la demande d’annulation d’une rupture conventionnelle, dont il n’est pas contesté qu’elle ait été signée par le salarié, dans la mesure où il n’est pas constaté qu’un exemplaire de la convention a effectivement été remis à ce salarié. La Cour de cassation affirme entre autres que « la remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire à la fois pour que chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention (…), et pour garantir le libre consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite le droit de rétractation en connaissance de cause ». A défaut la convention de rupture est nulle.

Le premier arrêt du 3 juillet 2019 précise que l’exemplaire remis au salarié doit être signé par l’employeur, ce qui matérialise le consentement de ce dernier à la rupture et permet d’établir la date de celle-ci.

Le second arrêt précise que cette remise au salarié n’est pas présumée : l’employeur qui se prévaut de cette remise doit être en mesure de le prouver, ce qui en pratique invite à faire signer un récépissé.

CONSEQUENCE PRATIQUE : SECURISER LA REMISE DE LA CONVENTION

La sécurisation de la mise en œuvre des procédures de rupture conventionnelle nécessite donc de faire signer au salarié un document attestant qu’il lui a bien été remis à la date de la signature un exemplaire de la convention de rupture conventionnelle signée par l’employeur.

Cette attestation peut être matérialisée dans un document spécifique ou sur le CERFA conservé par l’employeur dans l’encadré « Remarques éventuelles des parties ou des assistants sur ces échanges / autres commentaires ».

A titre indicatif le contenu de cette mention pourrait être le suivant : « X…. atteste m’être vu remettre ce jour un exemplaire de la convention de rupture conventionnelle, établi sur la base du CERFA numéro 14598 dûment complété de l’ensemble des mentions requises, daté et signé par moi-même et mon employeur ».