Contrat de travail

Une déclaration d’inaptitude met fin à la suspension du contrat

A la suite d’un avis d’inaptitude à son poste du 13 avril 2017 prononcé par le médecin du travail, un salarié est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 30 juin 2017. Entretemps il a été placé en arrêt de travail pour maladie du 14 avril au 28 mai 2017.

La loi prévoit qu’au-delà d’un délai d’un mois suivant le constat de l’inaptitude, le salaire doit reprendre, et ce jusqu’à la date du reclassement ou du licenciement (C. trav., art. L. 1226-4).

A contrario, pendant le délai d’un mois, le salaire est suspendu. Mais qu’en est-il si le salarié a été placé en arrêt de travail lui ouvrant droit à un maintien de salaire en application de la loi et/ou des accords collectifs ?

Dans cette affaire, la Cour d’appel a débouté le salarié de sa demande de rappel de maintien de salaire sur la période d’un mois suivant la déclaration d’inaptitude du 13 avril 2017 : elle estime que l’avis d’inaptitude fait obstacle à ce que l’arrêt de travail postérieur (du 14 avril au 28 mai 2017) ouvre une nouvelle période de suspension du contrat de travail.

La Cour d’appel est approuvée par la Cour de cassation dans un arrêt du 28 janvier dernier, souligne que « La cour d’appel, qui en a exactement déduit que le salarié était, à compter du 13 avril 2017, sous le régime de l’inaptitude, a fait ressortir que la suspension du contrat de travail ouvrant droit au maintien du salaire avait pris fin. » (Cass. soc., 28 janvier 2025, n° 23-18.585).

Un nouvel arrêt de travail ouvre-t-il une nouvelle période de suspension avec maintien de salaire ?

Le principe selon lequel la délivrance d’un arrêt de travail après le constat de l’inaptitude ne tient pas en échec le régime applicable à celle-ci n’est pas nouveau (v. par ex. : Cass. soc., 16 novembre 2022, n°21-18.132 ; Cass. soc., 5 mars 2014, n°12-26.958 ; Cass. soc., 22 juin 2011, n°10-14.499).

En revanche, est inédite – à notre connaissance – la traduction de ce principe en termes de neutralisation du maintien de salaire pendant un arrêt de travail. L’employeur est donc fondé à ne pas maintenir le salaire. On doit ajouter toutefois qu’il doit établir l’attestation de salaire auprès de l’assurance-maladie, tout en veillant à ne pas activer le mécanisme de subrogation.

La solution s’applique ici au cas où un arrêt de travail est prescrit après le constat de l’inaptitude. Mais s’appliquerait-elle également au cas où le constat d’inaptitude intervient pendant un arrêt de travail antérieurement prescrit ? En toute logique oui car la chambre sociale de la Cour de cassation a déjà admis que l’inaptitude peut être constatée à l’occasion d’un examen médical s’étant tenu pendant la suspension du contrat de travail (Cass. soc., 24 mai 2023, n° 22-10.517). Or dans l’arrêt du 28 janvier, la Cour considère qu’une fois l’inaptitude constatée, la suspension du contrat de travail ouvrant droit au maintien du salaire « avait pris fin ». Il semble donc logique d’en déduire que le constat d’inaptitude intervenant pendant un arrêt de travail met fin à la suspension du contrat de travail ouvrant droit au maintien de salaire.

Une nécessaire vigilance !

Cette solution étant inédite, il convient d’être prudent lors de son éventuelle mise en œuvre afin de ne pas augmenter le risque de contentieux. En effet, mal informé, le salarié voyant son maintien de salaire interrompu pourrait prendre acte de la rupture.

Attention par ailleurs aux dispositions conventionnelles, qui peuvent aboutir à des solutions plus favorables.

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