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Le mécanisme de « garantie d’évolution salariale » issu de la loi Rebsamen du 17 août 2015 vise à garantir à certains représentants du personnel et syndicaux une évolution salariale au cours de leur mandat, conforme à celle de leurs collègues (C. trav. Art. L. 2141-5-1). Ce mécanisme s’applique en l’absence d’accord collectif (de branche ou d’entreprise) plus favorable.

Un arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 janvier 2025 (n°23-20.466) vient apporter des précisions sur la méthode de calcul de cette garantie.

🔎 Quels représentants bénéficient de cette garantie d’évolution salariale ?

Pour mémoire, ce dispositif concerne :

  • certains représentants du personnel et/ou syndicaux, incluant notamment les membres élus de la délégation du CSE, les délégués syndicaux, les membres du groupe spécial de négociation, les représentants au comité de la société européenne, etc. ;
  • disposant d’un crédit d’heures dépassant 30% de la durée annuelle prévue dans leur contrat de travail ou à défaut, de la durée applicable dans l’établissement (par exemple, pour un salarié à 35H/semaine : 1607H × 30% = 482H, soit environ 40H mensuelles de délégation).

💡 Une garantie calculée au regard des salariés relevant de la même catégorie professionnelle

A défaut d’accord collectif plus favorable, les salariés concernés bénéficient d’une garantie d’évolution salariale au moins égale, sur l’ensemble de la durée de leur mandat, aux augmentations générales, et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable (C. trav. Art. L. 2141-5-1).

Pour la Cour de cassation, les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable, au sens de ce texte, sont ceux qui relèvent du même coefficient dans la classification applicable au sein de l’entreprise pour le même type d’emploi, engagés à une date voisine ou dans la même période (Cass. soc. 20 décembre 2023, n°22-11.676).

Lorsque la comparaison est impossible parce qu’il n’y a pas d’autre salariés dans la même catégorie professionnelle, cette garantie d’évolution salariale est au moins égale aux augmentations générales, et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans toute l’entreprise.

L’apport de l’arrêt du 22 janvier : calcul de la garantie en l’absence de tout salarié relevant de la même catégorie professionnelle

L’arrêt du 22 janvier 2025 vient apporter des précisions sur la méthode de calcul de la garantie, en l’absence de salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable. En particulier dans cette affaire, la Cour de cassation devait déterminer si la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l’entreprise devait prendre en compte, ou non, les augmentations individuelles résultant d’une promotion professionnelle entraînant un changement de catégorie professionnelle.

Dans son pourvoi, l’employeur critiquait en effet la méthode de calcul retenue par les juges du fond (CA Versailles, 5 juillet 2023, n° 21/02186), considérant que la loi a pour objet d’assurer aux représentants une évolution salariale et non une évolution professionnelle, pendant la durée de leur mandat. Ainsi, la moyenne des augmentations individuelles devait tenir compte uniquement des augmentations de salaire à qualification identique, et non des augmentations de salaire consécutives à une promotion professionnelle.

Le pourvoi est toutefois rejeté ; la Cour de cassation estime que la garantie d’évolution de la rémunération doit être déterminée par référence aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles, y compris celles résultant d’une promotion entraînant un changement de catégorie professionnelle.

Cette interprétation parait relativement sévère et pas nécessairement cohérente avec des solutions déjà retenues par la Cour de cassation. En effet, ce dispositif est inspiré de celui applicable aux salariées de retour de congé maternité, pour lequel l’Administration exclut de la comparaison « les augmentations liées à une promotion entraînant un changement de catégorie » (Circ. 19 avril 2007 relative à l’application de la loi n°2006-340 du 23 mars 2006). De même, les notions d’augmentations individuelles et de promotions ne se confondent pas dans le dispositif de l’index de l’égalité professionnelle.

La Cour de cassation ne va-t-elle pas au-delà de l’objectif initial poursuivi par le législateur : celui de lutter contre la pénalisation des représentants du personnel et syndicaux en matière exclusivement de rémunération, sans porter de considération sur l’évolution professionnelle, les deux notions étant distinctes ?

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