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Dans un arrêt du 22 mai 2024 (n°23-82.621), la Chambre criminelle vient préciser les conditions pour bénéficier de certains droits au cours d’une audition pénale.

Dans le cas d’espèce, il s’agissait d’un salarié grièvement blessé par la chute de panneaux transportés sur un chariot élévateur suite à la rupture des élingues conçues pour une utilisation unique et pourtant réutilisées. Faits reconnus par le dirigeant (d’où la violation manifestement délibérée retenue par les juges), mais il a tenté de faire annuler sa condamnation personnelle pour un vice de procédure sur l’absence de droits durant son audition comme témoin… en vain !

Être suspect ou ne pas être suspect, telle est la question ?

Il existe 2 types d’auditions dans le cadre d’une enquête pénale :

  • En qualité de témoin (pas de droit particulier) ;
  • En qualité de « mis en cause » (ouverture de certains droits) :
    • Sous le régime de l’audition « libre ».
    • Sous le régime de la « garde à vue ».

Lorsque que l’employeur est soupçonné d’avoir commis une infraction, il peut bénéficier de certains droits de la défense lors de son audition pénale « libre » et notamment :

  • Être informé du bénéfice de conseils juridiques dans une structure d’accès au droit
  • Être informé de l’assistance par un avocat (l’assistance d’un avocat n’est possible que si l’infraction poursuivie est un crime ou un délit puni d’emprisonnement)
  • Droit de connaître la nature de l’infraction reprochée
  • Droit de quitter à tout moment les locaux
  • Droit au silence

Ces deux derniers droits doivent être utilisés avec précaution et stratégie, à définir idéalement avec un avocat pour éviter d’être reconvoqué avec une mesure d’audition en garde à vue !

L’employeur peut-il automatiquement prétendre à Ces droits ?

Pas forcément ! Dans cet arrêt, les juges ont considéré d’une part, que la seule qualité d’employeur d’un salarié victime d’un accident du travail ne suffit pas à le suspecter d’avoir commis une infraction et d’autre part, que ces droits ne sont ouverts qu’aux personnes qui sont soupçonnées d’avoir commis l’infraction lorsqu’elles sont auditionnées (en l’espèce, tel n’était pas le cas au moment de l’audition, la « suspicion » n’étant intervenue qu’après le dépôt du rapport d’enquête du contrôleur du travail).

Pour éviter – et à tout le moins limiter – le risque de se présenter en audition sans être assisté (sachant que les déclarations faites seront reprises dans un procès-verbal que l’on demandera à l’employeur de signer -signature non obligatoire – et sur lequel il peut être difficile et à tout le moins délicat de revenir ensuite), il convient en pratique lorsque l’employeur reçoit une convocation à une audition (ou est convoqué par téléphone) de demander au service d’enquête (police, gendarmerie, inspection du travail) :

  1. Si la convocation concerne la société, personne morale qu’il représente ou lui-même en qualité de dirigeant, personne physique ?
  2. Et dans l’un et l’autre cas, si une mise en cause est susceptible d’intervenir afin que qu’il puisse, s’il le souhaite, être assisté d’un avocat avec lequel il pourra préparer l’audition.

CONSEIL PRATIQUE 

Si la date d’audition libre proposée ne convient pas à l’employeur et/ou est trop proche pour qu’il puisse s’y préparer, il ne doit pas hésiter à solliciter un report, le cas échéant, par la voix de son avocat.