Covid-19

Dans un arrêt de ce 14 décembre 2023, la CJUE décide que le droit de l’Union n’exige pas qu’un employé mis en quarantaine pendant son congé annuel payé puisse reporter ce dernier.

Le litige et la question posée

En 2020, un salarié allemand se voit octroyer un congé annuel payé pour la période du 3 au 11 décembre 2020. Ayant été en contact avec une personne contaminée par le Covid, il se voit ordonner une mise en quarantaine (conformément aux mesures sanitaires nationales) un jour avant le début de son congé, et pour la période du 2 au 11 décembre 2020.

Par la suite, il demande à son employeur le report des jours de congé annuel payé ayant coïncidé avec sa période de mise en quarantaine. Son employeur refuse, et le salarié saisit tribunal du travail. Le tribunal doute de la compatibilité de la jurisprudence des juridictions allemandes, selon laquelle la seule mise en quarantaine n’équivaudrait pas à une incapacité de travail obligeant l’employeur à reporter les jours de congé octroyés, avec le droit au congé annuel payé garanti par le droit de l’Union. Il saisit donc la CJUE à titre préjudiciel.

La solution

La Cour considère qu’une telle pratique nationale, qui ne permet pas le report des jours de congé annuel payé octroyés à un travailleur qui n’est pas malade, coïncidant avec une période de mise en quarantaine, est compatible avec le droit au congé annuel payé consacré par charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et concrétisé par la directive 2003/88.

Les arguments de la CJUE

La Cour rappelle d’abord la double finalité du congé annuel payé :

  • permettre au travailleur de se reposer par rapport à l’exécution des tâches lui incombant selon son contrat de travail et,
  • disposer d’une période de détente et de loisirs.

Elle relève que la finalité de la mesure de quarantaine, prévue par le droit allemand, est différente : elle vise à éviter la propagation d’une maladie contagieuse par l’isolement des personnes susceptibles d’en développer les symptômes.

La Cour confirme ensuite qu’une telle mesure est, à l’instar de la survenance d’une incapacité de travail en raison d’une maladie, un événement imprévisible et indépendant de la volonté de la personne qui en fait l’objet. Néanmoins un travailleur mis en quarantaine mais qui n’est pas en incapacité de travail justifiée par un certificat médical, se trouve dans une situation différente de celle d’un travailleur en congé maladie (subissant des contraintes physiques ou psychiques engendrées par la maladie). Dès lors, la finalité de la mise en quarantaine n’est, par principe, pas comparable à celle d’un congé de maladie et une période de quarantaine ne saurait, en soi, faire obstacle à la réalisation des finalités du congé annuel payé.

Enfin, selon la Cour, si la mise en quarantaine est susceptible d’avoir une incidence sur les conditions dans lesquelles un travailleur dispose de son temps libre, elle ne porte pas, en soi, atteinte au droit de ce travailleur de bénéficier effectivement de son congé annuel payé. En effet, pendant la période de congé annuel, le travailleur ne peut être soumis, de la part de son employeur, à aucune obligation susceptible de l’empêcher de se consacrer, librement et de manière ininterrompue, à ses propres intérêts aux fins de neutraliser les effets du travail sur sa sécurité et sa santé.

Dans cette situation, l’employeur ne saurait être tenu de compenser les désavantages découlant d’un événement imprévisible, tel qu’une mise en quarantaine imposée par une autorité publique, qui empêcherait son employé de profiter pleinement de son droit au congé annuel payé. En effet, la directive 2003/88 ne vise pas à ce que tout événement susceptible d’empêcher le travailleur de jouir pleinement et de la manière qu’il le souhaite d’une période de repos ou de détente justifie que des congés supplémentaires lui soient octroyés afin que la finalité des congés annuels soit garantie.

CJUE, 14 décembre 2023, aff. C‑206/22